Les masques “maison” pour la prévention du COVID-19, oui, mais pas n’importe comment!

Depuis le début de l’épidémie de Coronavirus, je suis très sollicitée pour la création et confection de masque pour des particuliers mais aussi pour du personnel soignant.

Jusqu’à aujourd’hui j’ai toujours refusé pour une simple et bonne raison, les masques de protection répondent à certaines normes qui définissent les matières à employer et des critères d’efficacité et de sécurité stricts.

Certains d’entre vous ne le savent peut-être pas mais j’ai longtemps travaillé en laboratoire pour l’industrie pharmaceutique entre autre. Impossible pour moi donc, de faire des masques à l’aveuglette.

Je ne voulais pas prendre le risque de donner aux gens des produits qui ne seraient pas efficaces, et pire, voir mes clients se retrouver à l’hôpital. Puis j’ai vu fleurir comme les jonquilles au printemps tout un tas d’articles et tutos plus ou moins douteux encouragent la fabrication de masque par et pour tout le monde. J’ai donc voulu vous aider à faire le tri dans cette jingle d’informations et répondre à deux simples questions,

Les masques que je peux faire avec mes chutes de tissus répondent-ils aux normes? Sont-ils réellement efficaces comme protection contre le virus?

Pour répondre à ces questions j’ai épluché les normes européennes auxquelles répondent les masques FFP, j’ai également contacté les organismes en charge d’homologuer ces produits pour savoir comment faire un masque en tissu qui soit le plus proche possible des masque FFP2 ou des masques chirurgicaux. Et sondé la toile à la recherche d’experts pouvant répondre à mes questions.

J’ai alors découvert toute l’ampleur de la complexité technique qui se cache derrière ce matériel à commencer par les différences fondamentales qui existent entre les masques chirurgicaux et les masques de protection FFP.

Après deux semaines de recherches et de compilations de données,  je partage avec vous mes conclusions qui s’appuient principalement sur le travail réalisé par l’AFNOR, l’initiative du CHU de Lille et l’article très bien documenté de Bérangère une ingénieur textile.

AFNOR met à disposition gratuitement un référentiel pour faciliter et accélérer la fabrication en série ou artisanale d’un modèle de masque, dit « masque barrière ».

L’AFNOR à en partie répondu à ma demande en proposant sur son site le 27 Mars dernier un masque “barrière” à destination du grand publique. Cependant je site:

« Ce masque n’exonère à aucun moment des gestes barrières. C’est une protection supplémentaire pour les personnes saines lorsqu’elles se déplacent ou travaillent », résume Rim Chaouy, responsable de pôle santé et sécurité au travail d’AFNOR et pilote du projet.

C’est un document de référence, un guide donc,  proposant des exigences à satisfaire pour la fabrication artisanale ou industrielle de masque en tissus. Les informations données sont assez techniques, difficile donc lorsqu’on est pas du métier de s’y retrouver. Si vous choisissez d’utiliser un des patrons proposé dans ce document, je vous conseil de prendre le masque trois plis, qui s’adapte plus facilement à différentes morphologies.

Attention aussi, il est régulièrement mis à jour, aussi vous devez les télécharger après avoir reçu le pdf, à l’aide du QR code que vous avez sur la première page avant d’en commencer la lecture.

https://www.afnor.org/actualites/coronavirus-telechargez-le-modele-de-masque-barriere/

MISE A JOUR : 10/04/2020

Aujourd’hui j’ai découvert que depuis la mi-Mars un groupe d’industriels textiles et l’état on travaillés à la création de nouvelles normes et ont ainsi crées la catégorie des masques à usages non sanitaires (UNS). Bien sûr, les petites entreprises comme la mienne n’ont pas été invitées à participer au développement de ces nouveaux masques en tissus c’est pourquoi je n’ai eu cette information qu’a la publication des résultats sur le site de la DGE direction générale des entreprises.

Ainsi, les masques en tissus sont désormais classés en deux catégories:

  • Catégorie 1 “UNS 1”: Masques filtrant à usage des professionnels en contact avec le publique. L’usage de ces masques filtrants est destiné aux populations amenées à recevoir du public dans le cadre de leurs activités professionnelles. Ils filtrent plus de 90% des particules émises d’une taille supérieure ou égale à 3 microns compatibles avec cette utilisation.
  • Catégorie 2 “UNS 2”:  Masques filtrants pour protéger l’ensemble d’un groupe portant ces masques et sans contact avec le public. Ces masques filtrants sont destinés à l’usage d’individus ayant des contacts occasionnels avec d’autres personnes, dans le cadre professionnel. Ce masque pourra être porté par l’ensemble des individus d’un sous-groupe (entreprise, service…) ou en présence d’autres individus porteurs d’un masque d’une autre catégorie, lorsque le poste ou les conditions de travail le nécessitent. Leurs propriétés de filtrations sur les particules émises de 3 microns apportent un complément de protection aux gestes barrières.

Ces masques répondent à des normes précises et doivent obligatoirement  être homologués. C’est à dire testés et validés par la DGA.

MISE A JOUR 20/04/2020:

Il existe désormais un collectif d’industriels qui proposent à la vente aux entreprises et collectivités des masques en tissus UNS 1 et UNS 2. Les masques non homologués sont maintenant appelés masques “grand public” et sont destinés à un usage non professionnel pour les particuliers. 

La grande distribution s’est également lancée dans la fabrication et/ou la revente de ces masques et l’état prévois d’en importer (voir le discours du premier ministre du 19/04/2020 à 1h54 sur la vidéo)

Sachez que notre région des Haut-de-France à déjà commandé un masque par habitant selon Xavier Bertrand. A voir comment ils seront distribués.

Que doit-on vérifier lors de l’achat d’un masque d’origine française en magasin?
• La présence d’un étiquetage de composition.

• La présence d’une étiquette sur chaque conditionnement commercial (sachet, carton, palette…) mentionnant le nom du fabricant et son adresse postale, la référence ou le nom commercial du masque, la catégorie du masque (“UNS 1” pour la catégorie 1 ou “UNS 2” pour la catégorie 2).
• La présence d’une notice d’utilisation incluant la composition des masques.
• La présence de la mention des conditions d’entretien.

Initiative locale: le CHU de Lille

Le CHU de Lille a également développé en partenariat avec un industriel textile et les organismes certificateurs, un type de masque en tissus à destination des personnels soignant.
Le cahier des charges de ce masque baptisé GARRIDOU® est disponible depuis le 2 Avril (ici) et n’est accessibles qu’aux professionnels du textile.
Cependant, une association en liens avec l’hôpital a entrepris de mettre en relation tout les couturiers et couturières volontaires avec les entreprises fabricant ce masque partout en France.

Les couturières et couturiers qui souhaiteraient se rendre utiles dans cette démarche peuvent donc trouver des informations sur le site www.des-masques-en-nord.fr et s’inscrire à une newsletter : ils seront ainsi prévenu(e)s si une unité de production se lance près de chez eux.

MISE A JOUR 12/04/2020:

Le masque Garridou a été évalué selon les nouvelles normes de la DGE sur les masques à usage non sanitaire et il en ressort qu’il est non conforme. Non pas pour ses capacité de filtrations qui elles sont excellentes mais pour la respirabilité. L’hôpital qui avait lancé une production massive et la vente de ce produit auprès des collectivités, travaille à la modification de sont masque pour le rendre conforme.

Les masques que je peux faire avec mes chutes de tissus répondent-ils aux normes? Sont-ils réellement efficaces comme protection contre le virus?​ Les réponses

  • NON: un masque en tissu n’est pas un dispositif médical, il n’est pas homologué, ne répond pas à la directive européenne 93/42/CEE qui sera bientôt remplacée par le règlement (UE) 2017/745, et n’a pas la certification CE. 
  • Concernant son efficacité contre le virus c’est plus mitigé. Il permet une protection complémentaire aux gestes barrière et à la distanciation sociale en évitant notamment la transmission main-bouche mais à la seule condition de bien choisir son tissu et de le porter de manière à ce qu’il couvre le visage de l’arrête du nez au dessous du menton. Tout les masques en tissus n’auront pas la même efficacité et ne remplacerons jamais un dispositif médical.

 Alors si vous souhaitez en coudre pour les hôpitaux, et le personnel hospitalier, gardez bien en tête que les hôpitaux sont en droit de les refuser voir même de les interdire totalement: il en va de leur responsabilité. De même pour toute personne susceptible de travailler au contact avec des personnes infectées par le COVID-19, posez des questions aux personnes qui les utiliseront et relisez bien les recommandations que vous trouverez notamment dans les liens ci-dessous en terme de matières à utiliser et de précautions à prendre lors de la confection. S’ils travaillent dans des conditions où il fait très chaud, privilégiez des tissus fins et précisez bien qu’il faudra très certainement changer de masque plus fréquemment que toutes les 3h.

Aussi, je vous conseil la lecture de l’article de ce blog. Lisez le attentivement et en entier, il est très instructif et de bons conseils.

Vous y trouverez un modèle de masque trois plis et un lien vers un site belge avec un pas à pas pour réaliser des masque en tissu dans de bonnes conditions d’hygiènes.

Dans tout les cas que ce soit pour un masque en tissu, un masque chirurgical ou un masque FFP2, s’il n’est pas porté correctement, et de ce que j’ai pu constater en regardant les journaux télévisés, c’est très souvent le cas, il ne sert à rien!

Mise à jour 20/04/2020:

Au vu du discours du premier ministre dimanche dernier et des nouvelles normes spécifiques aux masques en tissus, je ne suis pas certaine que l’on puisse continuer de confectionner ses masques bénévolement pour le personnel soignant si ce masque n’a pas été homologué catégorie UNS 1. En revanche, comme le précise la DGE sur cet article, Il est rappelé que la mise sur le marché de masques « grand public » ne fait pas l’objet d’une autorisation, ni d’une  homologation. On peut donc continuer à en faire et les utiliser pour faire ses courses.

Mes conseils pour la réalisation de votre masque en tissu

A l’heure où l’on parle de plus en plus de rendre le port du masque obligatoire, que les pharmacies ne peuvent plus en délivrer sur ordonnance et une pénurie qui persiste, beaucoup vont se tourner vers des masques en tissu fait maison.

  • Privilégiez le coton:

Même si d’après les tests de la DGA il est possible d’utiliser du polyester. Je trouve que c’est mieux d’utiliser du coton. Outre le fait que ce soit une matière agréable à porter sur le visage et qu’elle ne tienne pas trop chaud, il semblerai que le virus soit résistant jusqu’à 56°C. Il est donc important de pouvoir laver votre masque au minimum à 60°C voir de le faire bouillir. De plus, c’est plus facile à coudre pour un débutant. Pour vérifier ce que vous avez chez vous, brûlez un petit morceau du tissu, le coton en brûlant fait une flamme rouge qui sent le papier brûlé. Fumée blanche quand on éteint la flamme et presque pas de cendres qui elles sont grises. Si ça fond et fait une petite boule toute dure, c’est du tissu synthétique.

  • attention au tissage:

Faite attention a choisir de préférence un tissus en chaîne et trame, armure toile, tissé très serré et d’un poid moyen de 150g/m2 au minimum. Le virus ayant une taille de 1µm, c’est, pour le coton, cette qualité qui permet de filtrer le mieux selon le document de l’AFNOR. Surtout évitez les tissus enduits, non seulement vous ne pourrez pas les laver à haute température mais en plus vous aurez du mal à respirer.

  • Deux à trois épaisseurs:

Réalisez votre masque avec deux couches voir trois couche de votre tissu en coton. Vous pouvez également faire en sorte, comme le recommande Bérangère, ingénieure textile, de pouvoir insérer une couche d’une matière filtrante entre vos deux couches de tissus. A savoir une lingette électrostatique (celle qui attire la poussière et bien-sur qui ne soit pas imbibée de produit ou de parfum) ou un mouchoir en papier. Cette couche intermédiaire sera jetée après chaque utilisation et remplacée après lavage du masque.

  • Evitez les élastiques:

Oui c’est pratiques, mais ça ne tient pas la chaleur. Si vos masques sont à destination d’un hôpital, ils ne supporterons pas le bain de désinfection. Il vaut mieux faire des liens en tissus à nouer à l’arrière de la tête. 

MISE A JOUR 10/04/2020: Selon les tests de la DGA sur des masques proposés par des industriels les élastiques peuvent être utilisés et le masque reste viable jusqu’à 20 lavages alors faites vous plaisir!

  • Lavez votre masque avant utilisation

Les fabricant de textiles mettent ce que l’on appel des apprêts sur leur tissus notamment pour les protéger lors du stockage. Il est donc important de laver vos masque et même les faire bouillir (lavage à 90°C) avant de les porter. 

Pour le patron, il n’y a pas de modèle particulier, l’important étant qu’il couvre le visage de la bosse du nez jusque dessous le menton et qu’il n’y ai pas de couture dans le milieu. Pour le personnel soignant, j’aurai tout de même tendance à privilégier le modèle trois plis.

Mes dernières recommandations

Avant de commencer à coudre, surtout si vous comptez donner vos masques, lavez vous les mains, mettez un masque si vous en avez déjà fait un et désinfectez toutes les surfaces qui seront en contact avec le tissu. Machine, semelle du fer, table et mettez une toile de coton propre sur votre table à repasser. 

On ne TOUCHE PLUS un masque lorsqu’il est posé sauf pour le jeter, ou le laver, s’il est en tissu. On ne porte pas son masque pendouillant autour du cou, ou remonté sur le front pour le remettre en place uniquement quand on se trouve face à quelqu’un, en tripatouillant inévitablement sa face externe contaminée bien sûr, etc, etc. Et puisque j’y suis, on ne met pas de gants non plus, sauf profession particulière. Le virus ne pénètre pas par les mains, il est transporté par elles jusqu’aux portes d’entrée, bouche, nez, yeux. Donc, des mains lavées, c’est mieux que des gants contaminés avec lesquels on se touche inconsciemment le visage quand on n’a pas l’habitude.

Dans tout les cas, n’oubliez pas que ce masque ne vous dédouane pas d’appliquer les gestes barrières et ne vous autorise pas pour autant à sortir à tout va ou partir en vacances.

En espérant que très bientôt le seul masque dont nous aurons besoin sera celui-ci, prenez soin de vos familles et de nos soignants, restez chez vous pour ne pas avoir a aller chez eux!

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